« Procrastiner ? C’est remettre à demain ce qu’on peut faire le jour même. Comme par exemple, repousser le moment d’arranger ta chambre et préférer regarder les dessins animés à la télé ! ». Voici ce que me dit ma maman à 10 ans pour m’expliquer ce mot étrange “procrastiner”.
Plus tard, j’ai appris que la procrastination est une condition humaine. D’après le docteur en psychologie et en sciences comportementales Piers Steel auteur de « The Procrastination Equation », 95% des gens admettent qu’ils remettent leur travail à plus tard.
De même, son homologue et compatriote Canadien Tim Pychyl explique dans son ouvrage « Solving the procrastination puzzle » que procrastiner est « une réaction purement viscérale et émotionnelle à quelque chose que nous ne voulons pas faire ».
En bref, plus vous avez de l’aversion pour une tâche, plus vous êtes susceptible de procrastiner.
En effet, pour un élève, pas facile de s’atteler au devoir de maths, surtout si c’est une matière avec laquelle on n’est pas à l’aise. On repousse l’inévitable, on procrastine et on se retrouve à la dernière minute à bâcler son travail et rendre une copie dont on n’est vraiment pas fière. Au rendu des copies, notre mauvaise note finit par justifier notre appréhension de départ et renforcer notre envie de procrastiner la prochaine fois !
Un véritable cercle vicieux ! comment en sortir ?
Les causes de la procrastination
De ces travaux, Tim Pychyl a identifié 6 déclencheurs qui rendent une tâche plus rébarbative que les autres. Pensez donc à une tâche, une leçon ou un devoir de maths que votre enfant procrastine, remet à plus tard en ce moment, vous constaterez très probablement qu’elle présente plusieurs des 6 caractéristiques suivantes.
- Ennuyeuse
« Je repousse parce que la géométrie c’est vraiment ch… et ça me gave »
- Frustrante
« Je repousse parce que je n’y comprends pas grand-chose et en classe, je n’ose pas poser des questions parce que j’aurais l’air bête »
- Difficile
« Je repousse le devoir parce que je ne sais vraiment pas comment faire ni par quoi commencer »
- Ambiguë et non structurée
« Je repousse ce devoir parce que je ne comprends pas l’énoncé, ni par quel bout prendre le sujet »
- Pas intrinsèquement gratifiante (c’est à dire que vous ne trouvez pas le processus amusant)
« Je repousse parce que résoudre une équation, c’est vraiment pas fun »
- Un manque de sens personnel pour vous
« Je repousse parce que … à quoi ça sert les maths ? »
Les 6 remèdes à la procrastination
Dans un article de Harvard Business Review, l’auteur Chris Bailey identifie 5 stratégies pour vaincre la procrastination.
« Au niveau neurologique, la procrastination n’est pas du tout logique – c’est le résultat de la partie émotionnelle de votre cerveau, votre système limbique, qui force la partie raisonnable et rationnelle de votre cerveau, votre cortex préfrontal. La partie de votre cerveau c’est de dès que vous préférez Facebook au travail, ou que vous décidez de regarder un nouvel épisode de « mariés au premier regard » en rentrant chez vous. Mais il existe un moyen de donner le dessus à la partie logique de votre cerveau. Lorsque vous remarquez l’approche d’une épreuve de force entre la logique et l’émotion, résister à l’impulsion de la procrastination. » – Chris Bailey.
Nous sommes tous différents alors une astuce ne convient pas forcément à tous. Vous pouvez donc piocher parmi les 6 étapes proposées par Chris Bailey et Tim Pychyl pour réduire la procrastination chez votre enfant.
1 – Inverser les déclencheurs de la procrastination
Nous avons vu précédemment les 6 caractéristiques qui rendent une tâche rébarbative et donc enclines à nous faire procrastiner. Vous pouvez tous les deux essayer de penser différemment à cette tâche, en rendant l’idée de la rendre plus attrayante.
De plus, nous sommes tous munis de 8 intelligences, un bouquet d’intelligences dont certaines fleurs sont plus développées que d’autres cliquez ici vers l’article. Si votre enfant a comme intelligence prédominante l’intelligence visuo-spatiale alors son mode de mémorisation et de compréhension passent par sa capacité d’imaginer et penser en images. Vous pouvez alors l’encourager à reformuler sa leçon en dessins, en schémas et à ne pas lésiner sur les couleurs et les formes ! Maria Montessori l’avait bien compris et les récents travaux de neurosciences l’ont confirmé : plus les supports sont ludiques, colorés et esthétiques, mieux ils sollicitent les 2 hémisphères cérébraux et facilitent donc la flexibilité de penser et donc dans sa motivation à apprendre.
2 – Travailler en fonction de votre niveau de résistance
Lorsqu’une tâche déclenche des réflexes de procrastination, nous résistons à son exécution. Mais quel est notre degré de résistance ? Nous avons heureusement accès au thermostat donc nous pouvons l’abaisser afin de commencer par 30, 20, 10 min pour un projet au lieu de 60 min.
3 – Faire quelque chose – n’importe quoi – pour commencer
Fondamentalement il est toujours plus facile de continuer une tâche après avoir surmonté la difficulté initiale du premier pas. Effectivement, les tâches qui nous font procrastiner sont rarement aussi terribles que nous le pensons. Nous avons beaucoup d’appréhension et c’est le premier pas qui coûte.
Alors, Demandez-lui de signer pour 3 minutes d’engagement. Qu’il n’attende pas d’être prêt mais qu’il commence là, maintenant. L’objectif est de rompre l’inertie initiale. Un fois lancé, vous constaterez qu’il va prendre un certain rythme, que certaines informations lui sont plus familières et abordables qu’il ne le pensait au départ. Ce qui va activer sa motivation pour continuer.
4 – Dresser la liste des coûts de la procrastination
Cette astuce fonctionne mieux lorsque vous repoussez des tâches importantes. Vous pouvez lui faire admettre que ne pas apprendre ses formules trigonométriques de base n’a sans doute pas de conséquence immédiate mais qu’il accumulera du retard et des lacunes qu’il aura du mal à combler en devoir à la maison et en classe. Ainsi, il est très probable qu’il traîne longtemps ces difficultés en géométrie tel un handicap jusqu’au brevet, voir au baccalauréat.
5 – Se déconnecter
Nos appareils offrent une abondance de distractions, qu’il s’agisse d’e-mails, de médias sociaux ou de textos avec les amis et à la famille. C’est d’autant plus difficile que notre travail devient plus ambigu et non structuré (2 déclencheurs de la procrastination).
Alors préparez-lui un environnement sans distraction. Faites en sorte que son téléphone portable soit aussi difficile d’accès que son livre de maths soit à portée de main.
Il existe des outils très sympas pour l’aider à ne plus procrastiner, notamment l’application « Forest » : on se donne par exemple 1h de travail et on plante un arbre au début du chrono. Pendant qu’on travaille cet arbre pousse. Si on a le malheur d’ouvrir son téléphone avant 1h, il meurt …. . Au bout d’un certain temps si on est consistant, on devient le gardien d’une jolie petite forêt. Une belle récompense qui est aussi l’occasion de mesurer ses progrès.
6 – Se pardonner et oublier
Les mauvaises expériences liées à de mauvais comportements de notre part ont tendance à resurgir inopinément quand nous tentons d’accomplir des choses que nous redoutons. Il y a les regrettables « j’aurais dû ! » (Car on a repoussé les révisions et donc échoué) qui ont l’amer goût d’un « trop tard ».
Ces expériences minent, bloquent et empêchent d’avancer.
En fait, on procrastine, on est honteux de l’avoir fait et la mauvaise d’image que nous avons de nous-même nous incite à … procrastiner à nouveau !
Que faire pour briser ce cercle ?
Dans une étude menée en 2010 par Tim Pychyl, l’auteur conclut que « “Le pardon permet aux individus de dépasser leur comportement inadapté et de se concentrer sur le prochain examen sans le fardeau de leurs actions passées qui entrave leurs études. »
Alors, encouragez-le à fermer la porte au passé, sur sa culpabilité d’avoir procrastiné. On prend une grande expiration et on décide d’avancer !
Et demain
Pour récapituler
Pratiquer une ou plusieurs de ces 6 astuces régulièrement lui permettra de surmonter les émotions liées à la procrastination.
La première chose à identifier est la principale cause à sa manie de remettre au lendemain. Est-ce la frustration ? L’ennui ? La difficulté de la tâche ? le manque de clarté ? Le manque de sens personnel ?
Et seulement ensuite vous serez à même de piocher parmi les 6 remèdes la meilleure pilule efficace et 100% naturelle contre son habitude de procrastiner.
Il faut 21 jours de pratique pour faire d’une action une habitude, donc patience et constance sont les maîtres-mots.
C’est maintenant à vous de jouer !
Si vous avez d’autres astuces anti-procrastination à dévoiler, n’hésitez pas à me les laisser dans les commentaires. Et si vous avez apprécié cet article ou souhaitez me poser des questions, Faites donc ! Je serai ravie de vous répondre. À très bientôt !
Sources
« La motivation ». Antoine de la Garanderie, Broché, 1991.
https://hbr.org/2017/10/5-research-based-strategies-for-overcoming-procrastination
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0191886910000474
Merci pour ces 6 astuces ! Une astuce que j’aimerais partager et qui est redoutable, c’est de découper la tâche difficile en plusieurs étapes plus simples. Ensuite, il suffit d’en choisir une (en général la première mais cela dépend de la tâche à effectuer), et d’appliquer ton conseil 3 -> s’y mettre et se fixer un temps délimité. De cette manière l’enfant avance progressivement et sans se brusquer.
En effet, la technique du salami marche très bien aussi. Merci Mélissa pour tes retours
Ma fille procrastine pas mal quand elle n’a pas d’atome crochu avec le ou la prof . En plus, si elle ne trouve pas de sens profond à tel ou tel travail, c’est encore plus dur !
En revanche, elle commence par les tâches qu’elle aime le moins pour “en être débarrassée”
Je vais essayer ces astuces.
Merci pour cet article qui va beaucoup m’aider 🙂
Oui commencer par la tâche la moins attrayante mais importante quand on a le plus d’énergie est une très bonne stratégie, comme manger d’abord ses légumes comme disent les grands mères 😉
Merci d’avoir partagé ton expérience
Merci pour ce super article! C’est vrai que c’est pas évident de bouger les ados des écrans. Je vais tenter ces astuces!
Oui c’est tout un challenge . L’application “forest” peut être une bonne alternative pour les inciter à se détacher de leurs portables, si ils restent suffisament concentrés, ils seront les heureux propriétaires d’une forêt de plus en plus vaste sinon les arbres meurent
Merci Sébastien pour ton commentaire
Je serai ravie d’avoir des retours d’expériences
Merci pour cet article ! De notre côté, pour éviter la procrastination, je lui parle de l’objectif à atteindre et on discute ensemble des étapes pour y arriver. C’est elle qui choisit comment faire et cela la motive grandement parce qu’elle est à l’initiative !
la responsabilisation est une très bonne stratégie. Merci pour ce retour d’expérience !
Super article ! Efficace et bienveillant. Merci 👌
merci pour tes retours